À l’automne 2016, Richard Martineau intente une poursuite en Cour supérieure contre Ricochet. Le 15 mai prochain débute finalement le procès qui en découle, un événement qui créera un important précédent, peu importe son issue, sur la liberté d’expression et de la presse.
Parce que nous sommes un média indépendant, autant dans notre contenu que dans notre financement, et que c’est grâce à vous que nous sommes nés et que nous continuons d’exister, nous trouvions important de vous laisser savoir ce à quoi nous serons occupés dans les prochaines semaines : préparer ce procès, pour notre survie, mais aussi pour de nombreux enjeux qui vont bien au-delà de Ricochet.
Un rappel des faits; le chroniqueur Richard Martineau poursuit Ricochet, Marc-André Cyr et Alexandre Fatta pour la diffusion, la rédaction et des dessins accompagnant un texte satirique publié en 2016 : une fausse notice nécrologique de la carrière du célèbre chroniqueur. Évoquant la diffamation, M. Martineau nous demande la somme solidaire de 250 000 $ en dommages et intérêts et un total de 100 000 $ à titre de dommages punitifs.
Le contexte
Le procès du Journal de Mourréal s’est récemment tenu. Éric Duhaime, du 93,3, et Radio X envoie des mises en demeure à la députée solidaire Catherine Dorion. Québecor poursuit le Conseil de presse pour une série de décisions rendu par ce dernier.
La liberté d’expression est au cœur des débats et des événements des prochaines semaines. Que signifient toutes ces actions judiciaires? Ces diverses démarches en justice de la part de chroniqueurs, journalistes ou médias, qui sont de gros joueurs dans le monde médiatique et qui revendiquent la liberté d’expression pour justifier leurs propos, indiquent pourtant qu’à leurs yeux, leur liberté d’expression ne peut s’étendre à ceux et celles qui les critiquent ou parodient.
Comme on l’entend souvent, être pour la liberté d’expression, c’est être prêt à défendre la liberté de celles et ceux avec qui nous ne sommes pas d’accord. On voit bien ici que pour ces défenseurs de la liberté d’expression, cet adage ne colle pas. Ces actions peuvent être perçues comme une tentative de censure.
Ces poursuites lancent aussi le message qu’il est très difficile d’ouvrir un dialogue public sur le rôle des médias dans le climat social.
Toutes et tous n’ont pas le même pouvoir de se faire entendre dans l’espace public.
Comment des médias indépendants, comme Ricochet, peuvent faire face à ce genre de situation, alors que le financement des médias est plus précaire que jamais, particulièrement pour les médias indépendants?
Les conséquences
Sans préavis aucun, et près de huit mois après la publication de ce billet d’humeur, cette poursuite en Cour supérieure a énormément ébranlé l’équipe de Ricochet à l’époque et continue de le faire. Nous vivons, depuis trois ans, avec une épée de Damoclès au-dessus de nos têtes. Une collecte de fonds publique des plus généreuses nous a permis de pouvoir payer notre défense. Nous ne vous remercierons jamais assez pour ce précieux coup de pouce.
Malgré tout, nous avons maintenu notre mission; celle d’offrir une couverture des enjeux. Des enquêtes d’André Noël ont permis de dévoiler la proximité de la CAQ et les lobbies du pétrole pendant la dernière campagne électorale. Nous avons remporté un prix international pour l’un des épisodes de notre première série de podcasts francophones sur les traditions familiales et la transmission des savoirs dans les communautés autochtones du Québec. Nos collègues de l’édition anglophone sont également en lice pour un prix de l’Association canadienne des journalistes pour une enquête sur l’extrême droite.
Nous continuerons de faire tout cela et beaucoup plus, si nous survivons au procès. Car il faut bien le dire, ce dernier remet en cause la liberté d’expression, notre survie et la liberté de presse, puisque la conséquence du procès, si nous le perdons, est de disparaître.
Un autre appel
Pour ceux et celles dont les voix sont minoritaires, comme les médias indépendants et les personnes à qui Ricochet donne la parole.
Pour la liberté d’expression et celle de la presse.
Et pour répondre, pour exister et pour nous faire entendre, nous irons au front, le 15 mai prochain.
Si vous croyez que Ricochet a sa place dans la sphère médiatique, qu’un journalisme rigoureux et professionnel qui couvre les angles morts de l’actualité doit exister, le meilleur moyen de nous encourager à travers cette épreuve est de devenir membre de Ricochet.
Parce que le contenu de qualité implique des ressources importantes, dont financières. Devenez membre, incitez vos ami-es à l’être, et partagez nos contenus sur les réseaux sociaux.
Merci. Votre support est inestimable. On se voit le 15 et après, on espère.