Officiellement, la course ne fait que débuter. Malgré tout, un sondage publié samedi nous apprenait que le grand favori aurait perdu 5 % d’appuis depuis le mois de décembre, une période où l’actualité politique provinciale a pourtant été plutôt calme. Il est probablement trop tôt pour parler d’une réelle tendance, mais ce coup de sonde confirme tout de même un sentiment qui se diffusait depuis quelques semaines. PKP n’est peut-être pas invincible, finalement.

Personnellement, je me suis surpris à douter pour la première fois de l’issue de la course. Ce que j’entends autour de moi et dans l’espace public me permet de croire que je ne suis pas le seul à être dans cette situation. Le premier débat entre les candidats péquistes, organisé le 28 janvier dernier à l’Université de Montréal, avait déjà laissé une curieuse impression : le magnat de la presse, dont on vante depuis des mois le charisme et la poigne, paraissait hésitant sur des questions pourtant prévisibles et simples (indépendance, justice sociale, relations de travail, environnement, etc.). À ses côtés, ses concurrents affichaient, sur presque tous les sujets et malgré leurs propres défauts, un positionnement plus clair et plus convaincant. Le nombre de débats que contiendra la course n’est pas encore arrêté, mais on peut sans doute faire le pronostic suivant : plus il y en aura, plus l’étoile Péladeau pâlira. C’est bien pour cette raison que le principal intéressé cherche à tout prix à en limiter le nombre.

En fin de semaine, c’étaient les convictions linguistiques du favori qui faisaient jaser. Lors d’un concert à Rouyn-Noranda dans le cadre du Festival des musiques émergentes (FME), PKP aurait interrompu la jeune chanteuse d’un groupe québécois qui présentait sa prochaine chanson, afin que celle-ci soit « en français svp! » On raconte qu’un malaise a parcouru la salle et que le candidat péquiste s’est rapidement retiré. Épisode anecdotique, certes, mais qui révèle le caractère bouillant du personnage… ainsi qu’une certaine maladresse, qu’on avait d’ailleurs déjà pressentie à travers ses sautes d’humeur virtuelles.

Lisée, Ouellet, Dubuc

Parallèlement, il semblerait que la gauche du Parti québécois ait décidé de ne pas s’avouer vaincue sans au moins mener un combat honorable. Le sondage de samedi montrait en effet que Martine Ouellet, considérée jusqu’à récemment comme une candidate mineure, flirtait désormais avec la deuxième place. Elle aura manifestement réussi à aller chercher une portion significative des partisans de Jean-François Lisée, qui s’est récemment retiré de la course. Ce dernier aurait-il agi en toute connaissance de cause, afin d’éviter une division des militant.e.s progressistes au sein du parti de René Lévesque? C’est une possibilité.

Toujours dans le coin gauche, le syndicaliste Pierre Dubuc publiera dans les prochains jours un livre-choc destiné à déconstruire l’image de success-story qui colle à la peau de PKP. Selon La Presse, l’ouvrage reviendra non seulement sur les engagements politiques passés du candidat (notamment en soutien à Stephen Harper), mais également sur ces décisions d’affaires, qui auraient mené l’entreprise héritée de son père au bord de la faillite. L’objectif de l’auteur, militant péquiste de longue date et partisan de Martine Ouellet, est manifestement de nuire à tous les points de vue à l’image du meneur. Quels seront les impacts de cet ouvrage à l’intérieur (et à l’extérieur) du parti? La réponse à cette question pourrait avoir une influence sur la tendance actuelle.

Finalement, cette course sera peut-être plus intéressante qu’on ne le croyait. Les attentes sont si hautes à l’égard de PKP qu’on se demande bien comment il pourrait être à la hauteur. Si ces doutes se confirment, la déception pourrait être vive dans les rangs péquistes, et ce, quelle que soit l’issue de la course. En effet, advenant malgré tout une victoire de PKP, une question urgente se posera aux indépendantistes progressistes du Parti québécois : rester ou partir?